Takku / jeudi 20 mars 2025
Salut, je suis Oleksandr Kolchenko, un anarchiste, antifasciste et ancien prisonnier politique, originaire de Crimée.
En tant qu’activiste politique, j’ai été largement façonné par le mouvement antifasciste et le milieu punk hardcore. Ma vie comprenait des fréquentes bagarres de rue avec des nazis, la sécurité lors de concerts hardcore et des événements de solidarité pour des anarchistes et des antifascistes russes. Mes compas et moi avons également participé à des luttes environnementales, dont la plus importante a été le camp international de protestation contre le terminal à charbon de Sébastopol, en 2009.
Cependant, en 2014 nous nous sommes retrouvé.es dans une nouvelle situation, où nos anciennes doctrines ne s’appliquaient plus.
Par exemple, une fois, nous avions organisé un rassemblement en mémoire des personnes tuées par la police sur Maïdan. Nous avons déposé des fleurs devant le bâtiment du Conseil des ministres et allumé des bougies sur la place centrale de Simferopol [capitale de la république autonome de Crimée, créée en 1995 au sein de l’Ukraine et occupée par la Russie en 2014 ; NdAtt.]. De nombreux provocateurs sont venus à cet événement. L’un d’eux, un homme agressif, a commencé à nous suivre après la fin de l’évènement. Il nous a provoqué.es, nous et les passant.es, en criant que nous étions des partisans de Bandera [Stepan Bandera, fasciste ukrainien ayant collaboré avec l’Allemagne nazie ; NdAtt.].
Ce n’était pas clair si ce type était sobre ou bourré. Il nous a suivi.es jusqu’à un supermarché où, à cause de ses cris, nous avons été encerclé.es par un groupe de personnes âgées suspicieuses. Nous leur avons expliqué que nous étions antifascistes.
Par hasard, dans le supermarché il y avait aussi de jeunes hooligans de foot, âgés de 15 à 18 ans. Quand ils ont entendu que nous étions des antifascistes, ils ont commencé à se mettre des protège-dents en bouche et des masques sur le visage, malgré le fait qu’ils étaient tout le temps sous la surveillance des caméras. Pour notre part, nous avons commencé à sortir de nos poches des marteaux en caoutchouc, montrant que, malgré leur supériorité numérique, nous ne nous laisserions pas faire. En même temps, nous avons essayé d’éviter une bagarre dans le magasin, en discutant. Un de mes compagnons a appelé un ami, un hooligan apolitique, lui a expliqué la situation et a demandé que des mesures éducatives soient prises à l’encontre de ces jeunes.
Une fois que la situation a été résolue, nous sommes allé.es dans un bar, à un arrêt de bus de distance du supermarché en question. Nous y avons passé un peu de temps. Une des compagnonnes du groupe était déjà partie, mais elle nous a vite appelés pour nous dire que tout le groupe de jeunes hooligans de foot venait dans notre direction. Nous n’étions plus que deux. Mon compagnon est allé passer un coup de fil et vérifier la situation à l’extérieur. Il est revenu et m’a dit que nous allions nous battre. J’ai dit « nous sommes deux ». « Non, trois » m’a-t-il répondu.
Je me demandais qui était le troisième. Qui se porterait volontaire pour se faire tabasser par un groupe de jeunes ? Le compagnon m’a donné le pseudo d’un vieil adversaire appartenant à l’extrême droite, bien connu. Il nous avait attaqués par derrière à plusieurs reprises – et nous l’avions attaqué. Maintenant, il allait se battre à nos côtés, prêt à contrer une force supérieure.
Nous sommes allés dehors, où ce type a ensuite parlé à un représentant des hooligans du club de football de Simferopol, le Tavria[1], les accusant de ne pas faire correctement leur travail auprès des la jeunesse et que leurs jeunes se rendaient par bus entiers aux protestations anti-Maïdan, pour gagner de l’argent[2]. Le type d’extrême droite qui était venu à nos côtés a ajouté que son groupe avait réussi à arrêter l’un des bus, sur le chemin du retour, à s’emparer de l’argent sale et à dire aux jeunes que la prochaine fois ils seraient expulsés du milieu des hooligans. Le gars de Tavria écoutait la tête baissée et n’a pu rien dire pour répondre à ces accusations.
Les jours suivants, nous nous sommes rencontré.es dans un bar, nous avons regardé les événements de Maïdan, nous avons discuté de ce que nous pouvions faire à Simferopol et en général en Crimée. Nous avons fait remarquer au type d’extrême droite que, par le passé, dans les combats, il s’était comporté sans aucun honneur, même selon le code de la rue. Il s’est aussi plaint de notre comportement passé.
Plus tard, quand il y a eu une marche de protestation à Simferopol, en mémoire de toutes les personnes qui étaient mortes à Maïdan le 23 février [2014 ; NdAtt.], nous sommes arrivé.es avec notre bande antifasciste pour participer à l’événement et assurer la sécurité. Quand nous nous sommes approché.es du groupe d’extrémistes de droite, nous avons salué les plus dignes d’entre eux. Nous avons ignoré le reste, en signe de protestation. Vous auriez dû voir leurs expressions !
Ils nous regardaient, nous et leurs camarades, avec incrédulité, incapables de comprendre ce qui se passait. À peu près à la même époque, début 2014, à Simferopol, nous avons commencé à communiquer avec un autre bonehead, contre lequel nous nous étions battu.es à de nombreuses reprises au cours des années 2000.
Depuis lors, il a révisé ses opinions et adopté une position antifasciste. Nous sommes encore en bons termes avec lui. Ainsi, en 2014, tout est passé à un autre niveau. Tu devais faire un choix : soit tu était du côté du peuple ukrainien, soit du côté de la police et de l’État.
En février-mars 2014, des soldats russes sans insignes ont occupé la péninsule de Crimée. Plus tard, le 16 mars, un prétendu référendum a été organisé, pour légaliser l’occupation. Les observateurs du référendum venaient de Russie et des partis européens d’extrême droite, pro-russes. Dans l’ensemble, beaucoup de gens avaient été amenés de Russie. Pour moi, déjà à cette époque, la situation politique en Russie était très claire. Nous avions organisé des événements en mémoire de Stanislav Markelov et Anastasia Baburova[3] et en soutien des prisonniers de l’affaire Bolotnaïa[4]. Je n’avais aucun doute sur le fait que, en 2014, la Russie était un État policier qui devait être combattu par tous les moyens possibles.
Au début, nous avons participé à des manifestations contre la guerre, avec des ami.es et des compas. Ensuite, des provocateurs mandatés et payés par le gouvernement ont commencé à se rendre sur les lieux de rassemblement, en plus grand nombre que les manifestant.es elles/eux-mêmes, et leur tâche principale était d’utiliser la violence contre les participant.es. À cette époque, des travailleur.es d’une compagnie locale de trolleybus manifestaient aussi, demandant le paiement des arriérés de salaires. Ils/elles ont immédiatement été approché.es par un groupe d’hommes en uniforme sans insignes, qui ont pointé leurs armes sur les manifestant.es et leur ont poliment demandé de se disperser. Ensuite, des signalements sur les premier.es activistes disparu.es et kidnappé.es ont commencé à arriver.
À la lumière de tout ce qui précède, j’ai compris que les moyens légaux de résistance avaient été épuisés et j’ai accepté la proposition de participer à l’incendie de l’ancien bureau du Parti des régions. Le bureau était utilisé comme lieu de torture et d’interrogatoire pour toute personne soupçonnée d’activité anti-russe.
Le 16 mai, j’ai été arrêté par le FSB [le service de renseignement de la Fédération de Russie ; NdAtt.] et ensuite j’ai été emmené à Moscou. Des compas en Ukraine, mais aussi en Russie et dans d’autres pays, ont organisé une campagne pour nous soutenir, moi et Oleh Sentsov[5]. La campagne impliquait aussi des institutions officielles ukrainiennes, comme le Ministère des Affaires étrangères, et des militant.es du monde entier. Parmi ceux/celles-ci, il y avait des anarchistes et des antifascistes, ainsi que d’autres personnes qui étaient en faveur de l’Ukraine. Le soutien était tangible. J’ai reçu beaucoup de lettres et cartes postales de différents pays, tant de l’ex-Union soviétique – Ukraine, Bélarus et Russie – que de pays occidentaux, dont la Finlande, la Suède, le Canada, les États-Unis et l’Australie.
J’ai passé cinq ans et quatre mois dans une prison russe. Grâce à mes compas et plus généralement à des personnes pleines de bonnes intentions, mon séjour en prison a été relativement confortable, enfin, pour une prison. Grâce à leur soutien, j’ai pu, dans une certaine mesure, contourner les restrictions sur les lectures, commander des livres et des journaux relativement récents, qui étaient relativement acceptables dans une prison russe et, de temps en temps, acheter de la bonne nourriture. Il vaut aussi la peine de noter que le fait de recevoir des lettres et des cartes postales n’est pas seulement agréable en soi et rafraîchissant au milieu de la routine carcérale, mais montre aussi à l’administration pénitentiaire que le prisonnier a de son côté le soutien de la société. Cela pourrait réduire l’enthousiasme de l’administration pénitentiaire et des matons à augmenter l’inconfort quotidien du/de la prisonnier.e.
Le 7 septembre 2019, nous avons été libérés, dans le cadre d’un grand échange de prisonnier.es, et amenés à Kiev. Cela n’aurait pas été possible sans une campagne de soutien et d’information. À cette époque, la Russie réagissait encore, d’une certaine manière, aux pressions extérieures et maintenait au moins un quelque semblant de démocratie et de légalité. Maintenant, tous ces masques ont été enlevés. Mes impressions dans une prison russe et les conditions actuelles là-bas semblent venir de deux mondes différents. Si tu regardes les photos des prisonnier.es de guerre des dernières années, avant et après la prison russe, tu comprends à quel point les conditions ont changé. Sur les photos, les prisonnier.es de guerre libéré.es ressemblent aux prisonnier.es des camps de concentration.
Avant mon emprisonnement, j’avais vécu pratiquement toute ma vie en Crimée. Quand elle a été annexée, j’ai perdu ma maison. Peu après ma sortie de prison, le groupe anarcho-communiste BOAK[6] a publié un texte intitulé Anarchist Solution to Crimea[7]. J’étais furieux parce qu’on y faisait référence au référendum, bien que cela ait été un mensonge, une couverture pour l’occupation. Il semblait que les opinions de ceux/celles qui, ouvertement ou silencieusement, avaient accepté l’annexion de la Crimée avaient été entendues. Les opinions des opprimé.es et des réfugié.es avaient été mises de côté. Le texte était anonyme, je ne connaissais donc pas son auteur. Après la mort de Dmitry Petrov[8], en 2023, il s’est avéré que la plupart des textes de ce groupe avaient été écrits par lui. En 2019, il avait donc un certain point de vue, mais la suite des événements et la réalité de 2022 l’ont amené à conclure que l’on peut choisir le moindre de deux maux. En tant que personne honnête, il a fait son choix, il a rejoint la défense de l’Ukraine dès le premier jour de la guerre et a beaucoup fait pour créer une unité anarchiste ou une compagnie anti-autoritaire au sein de l’armée. Je peux ne pas être d’accord avec lui sur tout, mais Dmitry Petrov est un compagnon avec lequel j’aurais été heureux de discuter, s’il n’était pas mort.
Fin 2023, j’ai donné une interview à la publication anarchiste Contradictions/Kontradikce [voir ici ; NdAtt.]. Le même recueil, publié début 2024, comprenait aussi des entretiens avec une petite secte anarchiste appelée KRAS[9]. Cette secte n’a aucune influence en Russie, mais elle est très populaire dans certains pays d’Europe du Sud. La secte écrit sur la lutte de classe sans compromis, la révolution sociale et elle appelle les anarchistes ukrainien.nes « anarcho-patriotes » et « anarcho-nationalistes ». Par curiosité, j’ai regardé un streaming d’un représentant de cette secte, dans lequel il parle de la situation actuelle en Russie, de comment c’est difficile d’y organiser des protestations, sans parler d’une activité syndicale significative. Il se plaint que les gens y vivent sous la menace constante de la répression et de l’oppression. Le streaming est tellement en contraste avec la rhétorique générale du groupe qu’il sonne drôle et pathétique.
Le deuxième jour de l’invasion russe à grande échelle, j’ai décidé de rejoindre les forces armées ukrainiennes. Je suis allé au bureau de recrutement le plus proche, mais il y avait une file d’attente d’un kilomètre. Je n’ai pas attendu, mais j’ai appelé une personne que j’avais rencontrée quelques jours plus tôt, à la première du film Rhinocéros, d’Oleh Sentsov[10]. Il avait appartenu à des milieux nationalistes, mais avait révisé ses opinions et était donc un gars correct. Je lui ai demandé si je pouvais rejoindre son groupe. Moi et quelques-uns de mes anciens compagnons de Crimée sommes allés à sa base, où nous sommes restés quelques jours, parce qu’il y avait un couvre-feu absolu. Pendant ce temps, nous n’avons reçu aucune information sur notre recrutement officiel, quand nous allions recevoir nos armes, etc. Enfin, nous avons rejoint la compagnie Protasiv Yar, formée par des militants écologistes. Nous sommes allés à différentes adresses, pour chercher de potentiels saboteurs et espions qui auraient pu fournir des coordonnées pour les missiles. Seulement la moitié environ du groupe possédait des armes, certaines obtenues de manière officielle, d’autres de manière officieuse. À ce moment-là j’étais malade et je suis resté à la base pour monter la garde.
Ensuite, nous nous sommes organisés en deux groupes, qui devaient, alternativement, combattre dans la région de Kiev[11] ou maintenir une base et s’entraîner dans la ville. Cependant, le plan ne s’est pas concrétisé et tout le groupe est resté dans la ville pour garder les checkpoints et s’entraîner à des tactiques de guerre urbaine, sous la direction de notre nouvelle connaissance.
Bien que nous nous connaissions à peine, je n’ai jamais regretté cette rencontre, ni le fait d’avoir rejoint cette unité sous son commandement. Il est un bon exemple de leader anarchiste qui, au lieu de commander, organise les choses et inspire les autres à prendre des initiatives. Presque tous les jours, au début ou en fin de journée, on tenait une réunion – parfois une réunion générale, le plus souvent entre des « anciens », sélectionnés dans chaque salle – où on discutait des événements actuels, des plans pour l’avenir proche, des horaires d’entraînement, des problèmes et ainsi de suite.
Après la libération de la région de Kiev, nous sommes allés dans un village local, pour un camp d’entraînement, où nous nous sommes entraînés à des tactiques de combat et à des compétences médicales. À la fin de 2022, nous avons été transférés dans l’unité d’artillerie d’une brigade qui venait d’être formée, où je sers toujours.
Je veux dire quelques mots sur la raison pour laquelle je n’ai pas rejoint une unité anarchiste. Je craignais que toute l’opération ne s’enlise dans des discussions interminables sur la façon d’aborder telle ou telle question d’un point de vue idéologique. J’ai eu la chance de rencontrer beaucoup de commandants différents, les gens dans mes unités venaient de parcours politiques différents et personne n’a essayé d’imposer son opinion, mais chacun a été assez compréhensif avec les autres. C’est une sorte de pluralisme politique.
Maintenant, nous sommes dans une situation où nous devons faire face à des personnes avec des opinions politiques différentes, par exemple des racistes. Un soldat de notre unité a fait ressortir à plusieurs reprises ses opinions racistes. J’ai dit que, dans les années 2020, cela est extrêmement stupide. « Parmi les troupes ukrainiennes, se battent des gens de nombreuses origines ethniques et de l’autre côté, parmi les troupes russes, il y a tes frères blancs. » Après quelques discussions, il a admis que j’avais raison. Il convient toujours de noter qu’il est difficile de changer, pour des adultes, qui ont une vision du monde et un système de valeurs établis.
En conclusion, je voudrais dire que, depuis 2014, nous avons rencontré à plusieurs reprises des situations que nous n’aurions pas pu imaginer auparavant. En 2014, nous avons commencé à coopérer avec des personnes que nous avons combattu pendant des années et, en 2022, nous avons rejoint sans hésiter l’armée, envers laquelle nous avions toujours eu une attitude négative. À cette époque, ceux/celles que nous avons considéré.es comme nos compas peuvent soudainement rester silencieux.euses ou refuser de prendre parti dans cette guerre. Les adversaires d’hier peuvent se tendre la main. La guerre et l’occupation ont montré que nous, antifascistes et anarchistes, devons abandonner notre puritanisme isolé et sortir de nos vieilles ornières. Ce n’est qu’ainsi que nous pouvons véritablement lutter contre l’oppression.
Je voudrais remercier tou.tes celles/ceux qui n’ont eu aucune difficulté à choisir leur camp. Un grand merci à tous les collectifs, les organisations, les initiatives et les personnes de bonne volonté qui nous ont soutenu.es au fil des années.
Notes :
[1] SC Tavriya Simferopol.
[2] Le parti au pouvoir à l’époque, le « Parti des régions », pro-russe, payait des gens pour participer aux contre-manifestations opposées aux protestations de Maïdan, c’est-à-dire à l’anti-Maïdan mobilisé par le régime.
[3] Une organisation néonazie pro-Kremlin a assassiné l’avocat Stanislav Markelov et la journaliste Anastasia Baburova à Moscou, en 2009.
[4] L’« affaire de la place Bolotnaïa » fait référence à un procès au cours duquel près de quarante personnes ont été inculpées suite a une prétendue émeute sur la place Bolotnaïa, pendant une grande manifestation, à Moscou, en 2012. Dans ce procès, plusieurs anarchistes et antifascistes ont été condamnés à de longues peines de prison.
[5] Oleh Sentsov est un réalisateur, écrivain et activiste ukrainien qui, comme Kolchenko, a été arrêté en Crimée en 2014, condamné en Russie et relâché lors d’un échange de prisonnier.es en 2019.
[6] Боец Анархист, Боевая организация анархо-коммунистов, BOAK, Organisation de combat des anarcho-communistes.
[7] Анархистское решение для Крыма https://avtonom.org/freenews/anarhistskoe-reshenie-dlya-kryma
[8] Dmitry Petrov était un militant anarchiste russe, dont les activités allaient de la recherche académique et de l’écriture de livres à l’action directe militante et à la lutte armée. Il a été tué en combattant contre la Russie au sein des forces ukrainiennes, en avril 2023 [voir ici ; NdAtt.].
[9] KRAS-MAT, Confédération des anarcho-syndicalistes révolutionnaires.
[10] https://en.wikipedia.org/wiki/Rhino_(film)
[11] L’oblast de Kiev, ou région de Kiev, est la subdivision administrative entourant la capitale, mais qui ne comprend pas la ville de Kiev elle-même.