Barrikade / vendredi 27 juin 2025
À l’occasion du sommet de l’OTAN, qui se tient actuellement à La Haye, ce matin nous avons déposé un colis avec un contenu explosif au Campus de cyberdéfense, situé sur la Zollstrasse, à Zurich. Nous recommandons l’évacuation. Le campus est une interface militaire de la Suisse avec l’OTAN et un exemple des efforts communs de l’État, du monde économique et des universités pour l’économie de guerre. Pas d’arrière-pays tranquille pour la guerre !
Les ministres de la guerre des pays membres de l’OTAN se réunissent ces jours-ci à La Haye, pour trouver un équilibre entre leurs intérêts respectifs et ceux communs. Les présages à ce sujet sont connus et pas très bon pour leur entreprise : une crise capitaliste énorme, qui se manifeste de plus en plus fortement dans les métropoles, avec tous ses effets secondaires (après que, pendant des décennies, les conséquences de la crise de ce système aient été exportées vers l’ainsi-dite périphérie du monde), accompagnée de beaucoup d’incertitudes sur la question de savoir si le dompteur actuel de cet orchestre (c’est-à-dire les États-Unis) veut continuer à jouer son rôle d’instance ordonnatrice, car déterminante. La nervosité due à la cacophonie qui se propage dans le fosse de l’orchestre est supplantée par l’espoir des États (encore !) impérialistes qui appartiennent à cette alliance de guerre, de devenir un jour eux-mêmes le nouveau patron des patrons.
En conséquence, la direction de marche de l’OTAN est claire et non sujette à controverse, dans le principe, même si l’incertitude est grande et l’unité fragile : le réarmement pour la guerre ! Ou, comme l’Union européenne l’écrit dans son livre blanc : « The moment has come for Europe to re-arm [Le moment est venu pour l’Europe de se réarmer] ». La nature de la guerre à venir, qu’elle soit dirigée contre un ennemi extérieur commun, contre les partenaires d’aujourd’hui ou même contre un ennemi intérieur qui s’est insurgé, est secondaire. Les puissants savent à quel point la question du pouvoir est étroitement liée aux canons des fusils et the moment has come de s’y mettre. C’est pourquoi l’alliance militaire de ces 32 États, qui est déjà aujourd’hui responsable de plus de la moitié de toutes les dépenses militaires du monde, veut continuer à pousser pour investir plus, plus, plus dans la guerre. La guerre et les cadavres – le dernier espoir des riches.
La crise secoue le cocon suisse. Il fait de moins en moins bon, chaud et doux dans le discret et paisible arrière-pays capitaliste, dans cette niche qui, pendant des années, a été utile aux dirigeants de beaucoup de pays et qui a donc été encouragée et tolérée. De toute façon, le radotage sur la « neutralité » n’a jamais été très sérieux, car la position de classe de cet État est trop claire et l’intégration et l’implication de ses intérêts économiques avec ceux du camp impérialiste trop évidents. Mais maintenant, le cocon est ébranlé, l’un des axes de changement concerne l’intégration de la Suisse dans des alliances militaires impérialiste, en conséquence des têtes tombent en ce moment dans l’armée et les services de renseignement, car des changements doivent être imposés, des sièges de fonctionnaires deviennent instables et l’ancien doit céder sa place au nouveau. Ceux qui provoquent ces secousses se plaignent que la Suisse est un « trou de donut », c’est-à-dire un trou parasitaire entouré de gens vaillants et que les efforts faits jusqu’ici pour se positionner toujours en tant que partenaire, mais jamais en tant que membre de ces alliances, ne semblent plus suffisants. À l’étranger on exige par exemple plus, plus, plus d’OTAN et plus, plus, plus d’OTAN est exigé aussi par des parties de la politique locale, qui souhaite une adhésion plus étroite à ce projet de guerre.
Un lieu où la coopération avec l’OTAN est déjà testée est le Campus de cyberdéfense de Zurich. Le campus est l’expression de la stratégie étatique de s’orienter et se positionner dans le camp de bataille en constante évolution du XXIe siècle. Les guerres ont lieu aussi dans l’espace numérique, c’est pourquoi il faut un développement dans cet espace et ce campus, qui a été créé en 2019, y contribue de manière décisive. En plus du siège principal à Thoune, il y a des filiales à Lausanne et à Zurich, ce qui n’est pas un hasard, puisque c’est là qui se trouvent les École polytechnique fédérales, qui font partie intégrante de cette stratégie. C’est un mélange d’intérêts de l’État, du capital et de la science, qui doit contribuer à rendre la Suisse apte à la guerre et l’économie de guerre suisse pleine d’avenir (comme c’est le cas dans l’industrie des drones). Plus de guerre, plus de profit !
Dans ce cas concret, l’intégration du Campus de cyberdéfense passe par les structures numériques de l’OTAN en Estonie (l’ainsi-dite Cooperative Cyber Defence Centre of Excellence – CCDCoE ; nous n’irons pas plus loin, ici, sur la collaboration, distincte, du Campus avec les armées des États-Unis, d’Israël, de l’UE ou de l’Allemagne). Deux collaborateurs du campus sont présents sur place, on s’invite réciproquement à des conférences, on échange lors de rencontres dans un cadre plus restreint et plus discret. Les rapports annuels du Campus sont remplis de comptes-rendus sur ce sujet : « L’OTAN est un partenaire de coopération important : le campus apporte des contributions importantes au CCDCoE à Tallinn, tant par la présence des chercheurs William Blonay et Peter Hladký que par des contributions de recherche dans le programme de travail. En outre, le Campus participe à des groupes de travail sélectionnés car intéressants par le STO [Science and Technology Organization] de l’OTAN, avec le soutien du bureau d’Armasuisse [l’office fédéral suisse de l’armement ; NdAtt.] à Bruxelles ». Des questions ?
Nous n’en avons pas. C’est pourquoi nous avons déposé le colis avec le dit contenu : pour apporter, d’une manière tout à fait démodée, mais qui a fait ses preuves, de l’agitation dans l’arrière-pays des guerriers cybernétiques. Regardons autour de nous : en Suisse, en particulier dans les environs de Zurich, il y a beaucoup d’entreprises similaires, qui veulent faire leur part, pour devenir riches par la guerre et la misère. C’est un terrain de jeu pour de tels profiteurs de guerre ; attaquons-les, guerre à la guerre !
Pour une perspective révolutionnaire !